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Panser et penser la vulnérabilité de la relation | Synthèse et vidéo
Walter Hesbeen, infirmier et docteur en santé publique
Après avoir fait irruption aux États-Unis dans le secteur hospitalier, le terme « client » a désormais atteint nos pays francophones. Le diagnostic du recours à ce terme est simple : à vouloir s’immuniser contre une faible considération, les patients en appellent à l’expérience du client, supposément mieux traité. Si la raison est louable, assimiler le patient au client serait faire fi de sa nature même. Naïvement un lien pourrait être établi entre le patient et la patience. Or, il n’en est rien, “patient” venant de “Pathos” signifiant “souffrance”. Aussi, considérer le patient comme un client peut conduire à négliger voire à nier sa souffrance et sa vulnérabilité. L’occasion de rappeler que les soignants ont « pour mission d’aider une personne, et ses proches, à vivre ce qu’ils ont à vivre et qu’il ne suffit pas de bien faire tout ce que l’on a à faire pour que l’humain soit bien traité ».
Le malade a besoin d’être regardé et considéré avec sensibilité, dimension qui nous différencie des robots : « Nous ne sommes pas des distributeurs d’actes et de tâches. Il y a une différence entre faire des soins et prendre soin. » Quand on se penche réellement sur les réclamations exprimées dans le secteur hospitalier, dans 80 à 90% des cas, les patients ne réclament pas pour une raison technique ou scientifique mais pour se plaindre d’un manque de considération. La qualité de l’acte ne se confond pas avec la qualité de l’attention et de la présence.
Le patient a besoin qu’on lui parle de lui, non de sa prothèse ou de son poumon. Comme en écho à Guy Béart, le patient est cet Homme qui nous dit : « Parlez-moi d’moi, y a que ça qui m’intéresse, de mes humeurs, mes fureurs, mes faiblesses, parfois avec rudesse. Mais parlez-moi, parlez-moi d’moi ! » De la même manière que la parole soignante ne se confond pas avec la parole savante, n’oublions pas dans nos métiers de la relation client que la compétence ne compense pas l’attention et l’empathie que nous leurs devons, quelle que soit l’expérience que nous leurs donnons à vivre, voire à subir.
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